Un avertissement inquiétant venu du King’s College
David Betz, professeur de stratégie militaire au King’s College de Londres, alerte sur le risque de guerres civiles en Europe occidentale, en particulier en France et au Royaume-Uni. Selon lui, les tensions sociales et politiques de ces pays ne peuvent plus être réduites à des problèmes économiques : elles prennent de plus en plus une dimension communautaire et religieuse, qui accentue le sentiment de division.
Les fractures communautaires : un terrain inflammable
En France comme au Royaume-Uni, de larges segments de la jeunesse des quartiers populaires se définissent non seulement par leur origine géographique ou sociale, mais aussi par leur identité culturelle et religieuse. Dans ce contexte, l’islam joue un rôle central, car il constitue la première religion minoritaire en Europe de l’Ouest.
Pour Betz, les crispations viennent moins de la religion en tant que foi que de la perception d’un écart croissant entre des populations qui se sentent marginalisées, parfois stigmatisées, et le reste de la société. Les débats récurrents en France autour du voile, de la laïcité, ou des lieux de culte, alimentent un climat de méfiance, voire de confrontation symbolique.
Outre-Manche, les tensions ont également une dimension religieuse : émeutes à Leicester en 2022 entre jeunes musulmans et hindous, manifestations à Londres autour des questions de terrorisme ou de politique étrangère. Ces épisodes illustrent comment la religion devient un marqueur identitaire dans des sociétés fragmentées.
Les émeutes de 2023 : un révélateur
Les émeutes de 2023 en France, déclenchées après la mort de Nahel à Nanterre, n’étaient pas explicitement religieuses. Pourtant, elles ont mobilisé une jeunesse très majoritairement issue de l’immigration extra-européenne, souvent musulmane, et concentrée dans des quartiers où la pratique religieuse structure la vie quotidienne. Pour une partie de l’opinion publique, ces violences ont renforcé l’idée d’une rupture culturelle et religieuse entre une partie de la population et la République.
David Betz estime que ces fractures identitaires, si elles ne sont pas prises en compte, peuvent conduire à une dynamique plus grave : la constitution de communautés repliées sur elles-mêmes, susceptibles de s’opposer frontalement aux institutions de l’État lors de crises futures.
Une double radicalisation
Le professeur met également en garde contre une double radicalisation :
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D’un côté, une jeunesse marginalisée, qui se replie sur une identité religieuse comme réponse à l’exclusion.
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De l’autre, une montée de la rhétorique anti-islam et anti-immigration, portée par certains mouvements politiques et relayée dans les médias et les réseaux sociaux.
Ce face-à-face nourrit une spirale dangereuse : chaque épisode violent renforce les discours extrêmes, réduisant l’espace pour une coexistence apaisée.
Conclusion : un défi identitaire autant que social
Les avertissements de David Betz résonnent avec force : la menace de guerre civile en Europe ne naît pas seulement de la pauvreté ou du chômage, mais de la superposition des fractures sociales, communautaires et religieuses. L’islam, en tant que religion de millions de citoyens européens, est au cœur de cette dynamique. Le défi, pour la France et le Royaume-Uni, sera de transformer cette diversité en force plutôt que de laisser s’installer une logique de confrontation identitaire qui pourrait devenir explosive.